“Arbeit macht frei", ou “le travail rend libre" est un concept qui nait de paire avec l'évolution de l'esprit du capitalisme. La formulation voit le jour en 1845 sous la plume d'Heinrich Beta dans un livre intitulé “argent et esprit" (Geld und Geist). Cette expression et son concept seront repris par divers auteurs, jusqu'au parti nazi dans les années 30 (notons que l'un des goulags de l'union soviétique sur l'île Solovki, porte une inscription analogue dès 1920 : “Par le travail, la liberté !"), pour être finalement inscrite à l'entrée de certains des camps de concentration les plus meurtiers de la seconde guerre mondiale. L'idée, le concept, et cette vision du monde proprement inhumaine qui se cachent derrière cette expression, n'ont pas pour autant disparu avec le régime nazi ou l'union soviétique. La focalisation perpetuelle de nos sociétés sur les chiffres du chomage, les discours relayés par les éditorialistes provenant de milieux privilégiés, considérant les uns comme utiles, les autres comme futiles, moins que rien, assistés, presque parasitaires, contribuent à la continuité de cette vision de la vie, partialiste, fausse, aliénante et potentiellement fachiste.
On peut tergiverser sur ce qu'est l'art-plastique, il n'en reste pas moins que sa première fonction est anthropologique : L'art replace dans la grande continuité de notre civilisation et de son histoire, notre présent, et ce, par des objets et/ou des actions. Prolonger l'instant, le contextuel, dans l'intemporel, en faire le témoignage, voilà ce qu'est le travail de l'artiste plasticien. Nous avons pu voir lors des manifestations contre le pass sanitaire des représentations caricaturales des membres du gouvernement, ceux-ci y étaient dépeints en officiers nazis. Ma série “Arbeit Macron", n'a pas pour but de comparer ce dernier à un dictateur, ou même de dénoncer un état dictatoriel de notre société. Cette série ne fait que rappeler la filiation d'une pensée archaïque, mortifère et potentiellement meurtrière, ce qu'elle nous a coûté dans l'histoire, proche ou lointaine, et ce qu'elle continue de nous coûter aujourd'hui, entre mutilations, démembrements, servages modernes et guerres. Il nous faut nous rappeler ce que coûte le sou du linceul.